J'ai la chance de travailler avec des COUPLES humain/cheval. Des paires plus ou moins unies mais qui partagent le point commun de s'appartenir, bon an, mal an.
Contrairement aux paires contraintes et parfois mal assorties que les moniteurs de club sont amenés à composer pour permettre aux cavaliers un apprentissage sur des chevaux de différents types morphologiques et de personnalités variées.
Pour ma part, j'avoue que je me régale de voir évoluer les couples que je rencontre, l'un par rapport à l'autre, sur la durée. Et ce qui me frappe de plus en plus fort et vite, c'est la propension des chevaux à renvoyer leurs humains à ce qui pêche en eux, à cette part d'eux-même qui les met mal à l'aise. Et ce, quel que soit l'objectif de départ, compétition, loisirs, perfectionnement, recherche spirituelle, pourquoi pas...
Ayant le statut privilégié d'observatrice extérieure, j'écoute avec délectation la cavalière (vous me pardonnerez cette généralisation mais à plus de 95% de clientèle féminine, on peut faire entorse à la règle grammaticale, non?) me décrire son cheval, les mots qu'elle emploie (souvent très connotés, d'ailleurs, surtout pas de nuance!), le ton qui porte ces mots et l'énergie qui émane de mon interlocutrice. Et tous ces mots choisis par les humains pour parler de leur partenaire cheval, je les leur applique. Et ça marche à tous les coups.
Telle cavalière qualifiera de violent le départ au trot énergique de sa jument et je saurais alors que sa perception de sa partenaire la renvoie à sa propre part de violence non assumée.
Telle autre cavalière me fera part de son souci d'avoir son cheval constamment "avec elle", concentré sur ses demandes, et j'en déduirais que cette cavalière peine à rester concentrée et se laisse facilement distraire et/ou submerger par ses émotions.
Ou enfin telle autre cavalière me fera part de son sentiment d'impuissance face à sa jument perpétuellement anxieuse et imprévisible... alors que rien ne traduit dans le physique de la jument de stress chronique, contrairement au comportement très tendu et nerveux de sa partenaire bipède.
Bien sûr, il n'est pas aisé, ni confortable de prendre du recul sur la relation que l'on entretient avec son cheval et que l'on souhaite toujours idéale. Il sera toujours facile de dire que tout va bien, tant que les chevaux n'auront pas acquis le don de la parole.
Je pars toujours du principe que les chevaux, s'ils nous acceptent dans leur entourage, sur leur dos, à leurs pieds et à leur tête, font preuve envers nous de la bienveillante fermeté qui caractérise leur espèce... et si nous sommes d'assez bons élèves, ils sont tous disposés à nous l'enseigner. Sans jugement, dévalorisation ni impatience... ces "vertus" nous restant trop souvent propres.
Mon intime conviction est que les chevaux sont nos plus grands professeurs de vie sur cette planète. Plus même que les chiens, tout acquis à notre bonheur par nature, ou les chats, parce que... des chats, quoi! ;)
Les chevaux nous transportent. Physiquement. Mentalement. Spirituellement. Nous sommes plus grands sur leur dos, à tous points de vue. Notre perception des choses change. Ils nous prêtent la puissance de leur corps, la vitesse de leurs jambes, la finesse de leur ouïe et le perçant de leur vue.
Et malgré notre agressivité, notre impatience ou notre maladresse, ils nous acceptent encore et encore et, si nécessaire, nous servent encore et encore la même leçon.
Le cheval qui ne se laisse pas attraper au pré nous apprend la politesse et le respect: "on dit bonjour et on se présente en bonne et due forme, avant d'entrer en contact, voyons!", par exemple.
Ou encore, le cheval qui nous bouscule et nous grimpe sur les pieds nous apprend à tenir et affirmer notre place dans la société.
Prendre du recul et transposer le comportement de son cheval à son propre comportement, c'est la clé de la progression équestre... mais pas seulement... :)
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